Articles publiés par le Dr Jean-Luc Mergui dans Gynéco-online

L’interprétation des mammographies est une des taches les plus difficiles pour les radiologues car la sensibilité de la mammographie dite de dépistage varie entre 70 & 80%, d’où la possibilité intrinsèque  de « rater » d’authentiques cancers !

En Italie depuis 12 ans, certaines études ont d’ailleurs montré une augmentation significative des plaintes pour faux négatifs de la mammographie et aux USA le retard diagnostique pour un cancer du sein est la cause principale des plaintes juridiques pour erreur médicale (toutes causes confondues)  et  le second  en termes de montant financier ! A tel  point que le nombre de radiologues acceptant de lire et interpréter des mammographies aux Etats-Unis baisse de façon continue. Par ailleurs le taux de reconvocation pour anomalie de la mammo varie entre 3 & 6% dans la plupart des programmes de dépistage, celui-ci grimpe aux USA au delà de 10% par crainte des poursuites pour insuffisance diagnostique, d’où une modification de la spécificité, de la valeur prédictive positive et des sur diagnostiques et sur traitements dans certains pays en raison de la peur des poursuites.

Cette étude présentée ici, porte sur 351.000 mammographies de dépistage faite dans une région sud des pays bas entre 1997 & 2009, dans des conditions de dépistage organisé (double lecture, patientes entre 50-75 ans, mammo biennales). Parmi ces mammographies et après réévaluation à posteriori, les auteurs ont déterminé que 20.9% des cancers et 24.3% des cancers de l’intervalle ont été manqués par les mammographies initiales soit respectivement 308 & 163 patientes.

Seules 19 de ces patientes ont  contacté la direction de l’organisation pour demander des justifications à ce retard et aucune n’a ensuite porté plainte auprès des tribunaux, pendant le même temps 3 patientes ont directement porté plainte auprès des tribunaux sans demander de justification à l’organisme de dépistage ( l’une a été débouté et deux affaires sont encore en cours).

Les auteurs concluent donc qu’aux Pays Bas (tout du moins) les plaintes pour erreur de mammographie sont exceptionnelles bien que 20 % des diagnostics aient été manqués par le dépistage et que prés de 5% des patientes porteuses  d’un cancer ont eu un retard diagnostique significatif de ce fait !  Espérons  qu’en France, située entre les pays bas et l’Italie, les choses en soit de même car l’augmentation des plaintes et leur prise en charge financière par la justice pourraient avoir comme conséquences un taux de reconvocation, de biopsies ou explorations complémentaires (échographies, IRM), de sur-diagnostiques et sur-traitements dont les conséquences  économiques et humaines seraient peut-être pour le moins aussi importantes pour toutes les femmes.

Malpractice claims following screening mammography in the Netherlands.

van Breest Smallenburg V, Setz-Pels W, Groenewoud JH, Voogd AC, Jansen FH, Louwman MW, Tielbeek AV, Duijm LE.

Int J Cancer. 2011 Dec 15. doi: 10.1002/ijc.27398.